C I R C U L ' A C T I O N

La technologie est au service des automobilistes depuis de nombreuses décennies déjà. La première voiture que j’ai conduite, une Honda Civic hatchback 1990, ne possédait pas la direction assistée ou servodirection. Beaucoup plus de force dans les bras étaient requis pour tourner le volant. Aujourd’hui, la presque totalité des voitures la possède. Grâce à cette technologie, puisque la force nécessaire pour tourner le volant est moindre, des conducteurs plus frêles peuvent certainement conduire leur voiture de façon sécuritaire plus longtemps. C’est le même principe pour le freinage assisté ou servofrein.

Sur une longue distance, le régulateur de vitesse permet de ralentir la fatigue entraînée par l’appui du pied droit sur l’accélérateur. Pour un conducteur présentant moins d’endurance physique aux jambes, c’est un avantage.

Ce que la technologie nous propose aujourd’hui nous rapproche toujours un peu plus des véhicules que la science-fiction se plait à nous présenter au grand écran depuis Total Recall en 1990 avec Arnold Schwarzenegger, Rapport Minoritaire en 2002 avec Tom Cruise ou I, Robot en 2004 avec Will Smith. 

L’industrie automobile nous propose des véhicules qui détectent les risques de collisions, les piétons, qu’il a un véhicule dans notre angle-mort ou que nous sommes en train de dévier de notre voie, par exemple. Selon les modèles et les options, le système nous avertis en tant que conducteur ou il peut même « prendre le contrôle » et freiner ou changer la direction de notre voiture. Certaines voitures se stationnent toutes seules ou se « conduisent » toutes seules. Mais comment ça fonctionne et quels sont les impacts potentiels pour un conducteur aîné?

Les aides à la conduite, comme son nom l’indique, aident le conducteur dans sa tâche. Les voitures récentes sont équipées de plus en plus de capteurs électroniques qui permettent à l’ordinateur de bord de prendre des « mesures » en temps réel. Grâce à des caméras et des radars, les capteurs détectent la proximité d’autres objets, calculent leur position et leur vitesse relative à notre voiture.

Le système de surveillance des angles mort par exemple peut allumer une lumière dans le miroir de côté, faire vibrer le volant ou faire entendre une alerte sonore si le clignotant est en marche tandis qu’il y a un véhicule dans l’angle mort. Encore faut-il que le conducteur ait remarqué les signaux lumineux, vibratoires ou sonores, qu’il décode le message et qu’il agisse en conséquence. Le plus, le système de surveillance n’est pas infaillible lorsqu’il s’agit de plus petits objets à détecter comme des cyclistes, des piétons ou des motocyclettes.

Le système d’alerte de collision avant fonctionne de la même façon. Si un obstacle ou une collision imminente est détecté, le conducteur est avisé par des signaux d’alerte. Lorsque la voiture est aussi équipée d’un système de freinage automatique d’urgence, la voiture appliquera automatiquement les freins pour ralentir le véhicule ou l’immobiliser complètement. Même chose pour l’alerte de franchissement involontaire de ligne et l’assistance au maintien de la voie.

Dans un premier temps, pour que ces aides à la conduite fonctionnent, il faut que les capteurs soient propres. Ils sont donc affectés par les conditions météorologiques (neige, pluie, poussière, etc.) et peuvent être obstrués par des équipements comme des supports à vélo, une remorque, etc. Ils doivent aussi être bien calibrés. En cas d’accident, puisque la majorité de ces capteurs sont situés dans les pare-chocs, un remplacement complet est à prévoir, ce qui est plus onéreux. Enfin, certains systèmes n’affichent pas d’alerte lorsque la calibration est inadéquate ou le capteur défectueux.

Ensuite, ces systèmes ne sont vraiment efficaces que si le conducteur connaît leur existence et leur fonctionnement et s’il était attentif pour reconnaître le signal et y réagir rapidement et adéquatement. Si votre véhicule possède plusieurs aides à la conduite, comment ferez-vous pour différenciez chaque signal? De plus, pour le moment, il n’y a aucune uniformité entre les constructeurs automobiles, ni en ce qui a trait aux types de signaux ou aux logos qui peuvent apparaître dans le tableau de bord. Loin de permettre à une personne âgée qui présente un ralentissement de sa pensée d’être un conducteur sécuritaire plus longtemps!

Il est aussi démontré, en conduite automobile comme en toute chose, que plus une habileté est pratiquée, meilleur on devient. À l’inverse, moins on se sert d’une habileté plus on perd notre capacité à l’utiliser. Ainsi, lorsque notre voiture fait beaucoup de choses pour nous, on devient moins efficace pour le faire nous-même. Un bon exemple est la caméra de recul, maintenant obligatoire sur tous les nouveaux véhicules (légers) depuis le 1er mai 2018 au Canada. Se fier sur la caméra de recul pour se stationner est bien pratique, mais avez-vous remarqué qu’on devient vraiment moins bon pour se stationner après quelques temps sans utiliser la caméra? On perd la notion de la dimension de notre voiture et si la caméra est obstruée par la neige ou la pluie par exemple, on ne sait plus trop comment faire pour reculer notre voiture. En ce sens, on peut considérer que les aides à la conduite nuisent à notre capacité de demeurer des conducteurs sécuritaires longtemps.

Mais qu’en est-il de la fameuse voiture « complètement autonome »? En fait, il faut savoir que la SAE (Society of Automotive Engineers) classifie l’automatisation en 5 niveaux présentés dans ce tableau 

0

Aucune automatisation

Le conducteur réalise toutes les tâches de conduite.

1

Assistance au conducteur

Le véhicule est contrôlé par le conducteur mais certaines aides à la conduite peuvent être incluses dans le véhicule.

2

Automatisation partielle

Le véhicule possède certaines fonctions automatisées, mais le conducteur demeure engagé dans la conduite et doit être attentif à l’environnement en tout temps.

3

Automatisation conditionnelle

Un conducteur est nécessaire, mais l’environnement est surveillé par le système. Le conducteur doit être en mesure de prendre le contrôle du véhicule à tout moment.

4

Haute automatisation

Le véhicule est capable de performer seul dans certaines conditions. Le conducteur a l’option de contrôler le véhicule.

5

Automatisation complète

Le véhicule se conduit de lui-même. Le conducteur a l’option de contrôler le véhicule.

Aujourd’hui, même la Tesla n’est classée que de niveau 3. Ainsi, nous sommes loin des véhicules complètement indépendants. Il y a encore beaucoup de chemin à faire puisque les capteurs ne sont pas infaillibles et qu’ils dépendent de signaux qui ne sont pas toujours disponibles dans notre beau coin de pays. En effet, nos lignes sur la chaussée ne sont pas disponibles toute l’année.

Par ailleurs, je vous laisse sur une petite réflexion éthique bien intéressante. Je vous invite à regarder un vidéo sur YouTube (en anglais, mais les sous-titres français sont disponibles), que je vous résumerai ainsi : si les voitures complètement autonomes présenteront de nombreux avantages, dont

  • une réduction des accidents par élimination des erreurs humaines,
  • une diminution du trafic,
  • moins de stress et de rage au volant
  • tout en nous offrant plus de temps libre
  • et la liberté de sortir quand bon nous semble pour aller où bon nous semble au-delà du moment où nous ne serions plus en mesure de nous conduire nous-même,

les accidents ne seront jamais complètement évitables. Des algorithmes mathématiques devront être conçus pour que notre voiture autonome réagisse toute seule, mais quelle sera sa décision? Est-il par exemple plus moralement acceptable que notre voiture emboutisse la voiture à notre droite qui transporte une famille de 4 personnes ou la voiture à notre gauche qui ne transporte qu’une seule personne? Qu’en est-il si cette personne était une femme enceinte? Un dilemme de société intéressant.

Pour poursuivre la réflexion :

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