La deuxième étape consiste à performer musculairement l’action que le cerveau a choisie. C’est ici qu’entre en jeu les composantes physiques du conducteur. Différentes conditions de santé peuvent affecter la vitesse et la qualité de cette étape. L’arthrose, l’arthrite, la douleur, la perte de sensation dans les pieds due par exemple à une mauvaise circulation sanguine ou à une neuropathie secondaire à un diabète, des déformations suite à des fractures, un plâtre, une chirurgie récente (ex. prothèse de hanche ou de genou) ne sont que quelques exemples de conditions qui touchent la performance du geste de freinage.
Dans ma carrière d’évaluation de l’aptitude à la conduite automobile, je n’ai rencontré qu’un conducteur qui avait l’habitude de « conduire à deux pieds » c’est-à-dire d’activer la pédale d’accélérateur avec le pied droit et la pédale de frein avec le pied gauche. C’est une habitude de conduite assez peu répandue (au Québec du moins), plus souvent rencontrée chez les anciens conducteurs de véhicules à transmission manuelle.
S’agit-il d’une bonne pratique ?
Les supporters de cette technique de conduite argumentent que de cette façon, le temps de déplacement entre la pédale d’accélération et la pédale de frein est éliminé et donc que la manœuvre est plus rapide, en plus d’éviter des erreurs où le pied droit ne se déplace pas complètement sur la pédale de frein.
Les opposants à cette technique soulignent de leur côté que c’est une technique plus complexe qui implique la coordination des deux pieds et qu’en situation d’urgence, les conducteurs pourraient appuyer accidentellement sur les deux pédales à la fois. Les conducteurs peuvent aussi garder le pied gauche appuyé sur la pédale de frein ce qui peut causer des bris mécaniques à long terme en plus d’illuminer les lumières de freins sur le véhicule alors que le conducteur n’a pas l’intention de s’arrêter.
Une étude américaine s’est penchée sur le phénomène de la conduite à deux pieds. Elle a mesurée la vitesse de freinage des deux techniques, sur un simulateur, auprès de 30 étudiants universitaires. Les résultats font état qu’avec la technique à deux pieds, les conducteurs immobilisaient leur véhicule plus rapidement qu’avec la technique à un pied et sur une distance plus courte. Toutefois, la différence n’était pas très significative entre les deux.
Doit-on conclure que pour être plus sécuritaire nous devrions se mettre à utiliser la technique à deux pieds ?
Comme pour toutes les études, il y a plusieurs limites à cette étude à mettre en lumière avant de tirer une telle conclusion. D’abord, il faut noter que l’étude a été réalisée sur un très petit échantillon de participants. Ensuite, l’étude a été réalisée sur un simulateur, ce qui garantit l’homogénéité des conditions d’évaluation, mais ne permet pas d’affirmer que les résultats sont les mêmes en situation réelle de conduite. Les auteurs de l’étude argumentent que leurs participants étaient habitués à conduire à un pied. Ils estiment qu’avec des participants habitués à conduire à deux pieds, les résultats pourraient être plus significatifs. Enfin, puisque les participants avaient 21 ans en moyenne, on ne peut pas tirer de conclusion probante en lien avec les conducteurs aînés.
Bref, une chose est sûre, si ce n’est pas dans vos habitudes de conduire à deux pieds, ce n’est pas le moment de commencer ! De même, si c’est dans vos habitudes de conduire à deux pieds, ne changez pas de technique, à moins que cela ne vous cause actuellement des problèmes.